Sur les rives de la Boutonne s'étendait
une villa gallo-romaine, Angeriacum, dont on sait
peu de choses et qui finit par être pillée par les
barbares. Une chapelle et une résidence des Ducs
d'Aquitaine furent par la suite édifiées à son emplacement.
En 817, Pépin, duc
d'Aquitaine & petit-fils de
Charlemagne, y reçut miraculeusement une relique que l'on dit
être la tête de Saint-Jean le Baptiste,
ramenée d'Alexandrie par le moine
Félix. Un monastère
fut fondé, puis un village se développa autour comme
c'était toujours le cas à l'époque (activité
économique créée par le monastère).
Angeriacum devint Saint Jean d'Angéry, puis, les
mutations de la langue française aidant : Saint Jean
d'Angély.
La ville ayant été
ravagée à plusieurs reprises (850, 860 et 876) par les Vikings, basés
non loin, à Taillebourg, la
précieuse relique fut perdue et l'abbaye détruite. En
940-941, le roi Louis d'Outremer décide de refonder
l'Abbaye et c'est en 1010 qu'une abbaye
bénédictine est finalement solennellement fondée et prise en
charge par l'abbé de Cluny,
Odilon. Sa puissance
et son rayonnement s'accrurent rapidement et elle devint
une étape majeure sur le Chemin de Saint-Jacques de
Compostelle.
En 1050, le chevet de
l'Eglise entreprise par la Comtesse Agnès, veuve de
Guillaume V Duc d'Aquitaine, est consacré. La bourgade se
développait en même temps et, le 14 juillet 1199, elle
reçut la charte de cité du Roi d'Angleterre Jean sans
Terre, Duc d'Aquitaine et frère du Roi Richard Coeur de
Lion. En 1204, Philippe Auguste, Roi
de France, qui s'était emparé de la ville sans coup
férir, la confirma. La trève entre la France et
l'Angleterre est signée en 1214, et l'abbé de
Saint-Jean fit même office de médiateur.
La Basse Saintonge,
saignée par de violents affrontements durant la "Guerre
de Cent Ans", devient alors un vaste champ de
bataille opposant Anglais et Français. Pillée par les
Anglais du Comte de Derby en 1346, Saint Jean d'Angély
fut ainsi occupée jusqu'en 1372, date
à laquelle Du Guesclin, aidé des Angériens menés
par le maire Patrice de Cumon, réussit à
chasser les Anglais de la ville : Saint Jean d'Angély revient
alors définitivement à la France. La Guerre de Cent Ans n'empêcha
pas la construction d'une magnifique
abbatiale gothique.
Mais Saint-Jean d'Angély
devint au 16e siècle l'un des principaux bastions de la
Réforme : c'est ainsi, par exemple, des presses de son imprimerie
que sortit "L'Histoire universelle" d'Aggripa
d'Aubigné. L'abbatiale gothique fut, dès lors, complètement
détruite par les Huguenots au cours des Guerres de Religion en
1562-1568. La ville, assiégée, capitule devant Charles IX
en 1569. En 1576, le Prince de Condé, chef
huguenot, s'y installe. Sa mort demeure un mystère et
c'est sa femme fut même accusée de l'avoir empoisonné
("l'affaire de Saint-Jean d'Angély"). Une
Abbatiale provisoire est construite en 1608-1615 mais, en 1621, la cité
huguenote doit se rendre au Roi Louis XIII,
après un mois de siège et la ville est à nouveau
pillée. Elle perdit
ses privilèges et jusqu'à son nom. Pendant quelques
années, elle devint ainsi "Bourg-Louis", au
coeur défendant des Angériens ! Pardonnée par Louis XIV, qui y séjourna
plusieurs fois, la ville connut enfin la paix.
L'abbaye fut reconstruite
au 17e et 18e siècles (1622-1772), alors que St Jean d'Angély
profitait de la prospérité que lui apportait le
négoce des eaux-de-vie, mais la Révolution arrêta les
travaux de l'abbatiale (1741-1789) : il n'en reste aujourd'hui que les tours.
C'est aussi à cette période, durant la Terreur, que l'on tenta pour la
seconde fois de débaptiser notre pauvre ville : la
dénomination révolutionnaire "Angély Boutonne"
ne résista cependant pas aux années, et c'est bien
heureux.
L'histoire de Régnaud de St Jean d'Angély,
avocat angérien né en 1762, et Député du baillage de
St Jean aux Etats-Généraux de 1789, mérite d'être
notée tant il marqua cette période. Administrateur des
hôpitaux à l'armée d'Italie, il se lia avec Napoléon
Bonaparte. Il est nommé au Conseil d'Etat après le
"coup" du 18 Brumaire. Stendhal,
alors jeune "auditeur", s'amusait à y singer
son air important et gourmé. Il contribua à la
rédaction du Code civil, fut nommé académicien &
procureur général de la Haute-Cour impériale en 1804,
et enfin reçut le titre de Comte d'Empire en 1808.
C'est alors qu'il décida d'accoler à son nom
(Regnaud...) le nom de sa ville (...de Saint-Jean
d'Angély). Notons que sa
femme était connue pour être la plus belle femme
de la Cour impériale. Quoi qu'il en soit, proscrit après la chute de l'Empire,
il fut amnistié en 1819 mais mourut d'émotion le jour
de son arrivée à Paris.
Point de départ de la
campagne bonapartiste en 1848 en Charente inférieure, la ville,
extraordinairement prospère, devint très
rapidement farouchement républicaine, à l'image du Département, bastion
fameux du "Radicalisme". Plusieurs grands
députés et/ou maires radicaux de St Jean d'Angély marquèrent ainsi son histoire,
parmi eux : Eugène Réveillaud (tournant
du 20e siècle), Jean Réveillaud et Longuet (entre-deux-guerres). Mais la
grande prospérité de la ville, dont témoigne le
Marché (construit en 1856), est rapidement brisée par
le crise du phylloxéra qui détruisit les vignobles de
la Région (années 1870s). L'agriculture continua
néanmoins de jouer un rôle essentiel dans l'économie
angérienne. De cette période restent célèbres les
fameuses expéditions de Louis
Audouin-Dubreuil (années 1920-1930s : traversée du
Sahara, la "Croisière noire Citroën", et la
"Croisière jaune Citroën), angérien de
naissance.
Aujourd'hui, Saint-Jean
d'Angély, au centre d'un Pays de près de 30.000
habitants (les "Vals de Saintonge"), compte
8.687 habitants (Angériens) et est un chef-lieu
d'arrondissement & une sous-préfecture de la
Charente-Maritime. La ville et son arrondissement,
traversés par l'autoroute
(A10), tout en se tertiarisant, restent attachés à
l'agroalimentaire, au commerce des eaux-de-vie (Pineau
et Cognac), des biscuits (Brossard), ou encore des bois et
dérivés, ainsi qu'aux assurances (MAPA), tout en développant son activité
touristique, mais peine à rebondir, victime comme bien
d'autres villes de l'exode rural et du vieillissement.
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